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24 août 2019 6 24 /08 /août /2019 06:32

Amis lecteurs, je reviens sur mon blog afin de relater la réussite de mon objectif cycliste de l'année, à savoir le Paris-Brest-Paris.

Après avoir passé avec succès la suite des brevets de 200, 300, 400 sous la pluie, 600 en solitaire, j'ai obtenu le droit, comme environ 1600 autres Français, de m'aligner sur cette épreuve légendaire. Elle mobilise d'ailleurs tellement d'étranger que pour la première fois le couperet est tombé : il fallait avoir réalisé au moins un brevet qualificatif l'an passé. Mon 400 km de Feurs m'a sauvé !

C'est avec 10220 km dans les jambes depuis le début de l'année que je vais m'élancer depuis Rambouillet en direction de Brest. J'ai plagié l'entraînement de 2015, qui m'avait réussi... Mon temps de 65 h 33 min me paraissait largement améliorable. Mais la météo annonçait un vent défavorable jusqu'à lundi soir, avec potentiellement des averses, et surtout un changement de direction (plutôt nord) pour le retour...

J'avais décidé de dormir si possible une seule fois, ne sachant a priori pas où. J'avais le même vélo qu'en 2015, toujours utilisé pour les épreuves d'endurance. Un petit prolongateur et un porte-bagage arrière avec sacoche Vaude toute neuve étaient les nouveautés. Samedi, sous les nuages et sur un terrain mouillé, j'ai passé le contrôle des vélos avec succès, comme mes 3 collègues Jean-Paul, Patrice et Alain. Globalement en alignant le poids du vélo pré-équipé (11 kg), du sac à dos avec vêtements et autres accessoires (3 kg), sacoche avec nourriture (4 kg), 2 bidons pleins (1,3 kg) et 3 bananes, je devais rajouter pour les bosses environ 20 kg aux 55 kg du participant !

Nous avons ensuite fait le tour des vélos du concours. Tom, participant avec le vélo des cycles Victoire, m'a même reconnu en tant que participant au Trophée des Grimpeurs. Puis nous sommes allés à Dourdan passer la nuit, après avoir dîné, non sans mal, dans un Kebab. La nuit fut bien plus calme pour moi qu'il y a 4 ans. C'est une bonne chose. Je suis allé déjeuner très tôt, retrouvant des participants, dont un Belge avec lequel j'ai échangé.

Puis nous sommes retournés à Rambouillet et c'est sous le déluge que j'ai pris place avec ma voiture. J'ai pris mon plateau repas de midi, vers midi. Ce qui me laissait largement le temps de digérer, partant à 16 h 30. A ma droite se trouvaient des Américains. Ensuite je me suis baladé, discutant de ci de là avec diverses personnes. Puis je suis allé préparer mon vélo pour le grand départ. Le plus difficile fut de trouver comment fixer la puce. Après diverses idées, je décidai de la fixer contre la tige de selle en m'appuyant sur la petite sacoche qui contiendrait des pâtes de fruit. Laquelle sacoche j'ai rigidifiée avec des attaches velcro. Et ce fut une très bonne idée, car je n'ai eu aucun souci de toute l'épreuve.

Environ une heure avant le départ je me suis retrouvé dans le sas C. Nous étions bien entassés, mais ça restait raisonnable pour moi. J'avais pensé à prendre une petite bouteille d'eau de 50 cl, que je buvais régulièrement... Puis nous sommes passés au stand tampons. Enfin devant le portique du départ. Agnès, Françoise (accompagnatrices de Jean-Paul), Jean-Paul, Alain et Patrice étaient là pour m'immortaliser avant le départ. Certes je partais le premier, mais je savais que j'arriverai des heures derrière Jean-Paul. Normal, car c'est un grand rouleur équipé d'un vélo léger et avec assistance.

Dès le départ je peine à enclencher ma cale gauche, ce qui laisse un trou que je vais combler dans un premier effort inutile. Nous gros groupe part déjà devant et je me retrouve dans un second groupe. Mais il faut relancer. Quand je me mets en danseuse le vélo tangue un peu, car je ne suis pas encore habitué au poids de la sacoche arrière. Bon il va falloir faire attention. Dans chaque bosse le groupe s'amenuise. Je monte bien, mais je me dis que je dois dépenser de l'énergie par rapport à ceux qui n'ont pas de bagages.

Arrive un lieu-dit nommé "La butte d'Auvergne". Il y a une bosse et je suis dernier du groupe, et là je bute, moi l'Auvergnat, dans la difficulté. Je me retrouve seul face à un vent très fort en haut. Je vois le groupe s'éloigner inexorablement. Nous allons nous retrouver au bout d'un moment à trois, mais les deux autres prennent des relais moins rapides. Je dois mener. Puis dans une bosse très dure je tente de rejoindre le groupe en montant à bloc. Mais elle est trop courte et là c'est définitivement fini. Je vais m'arrêter au km 70 afin de faire un besoin et de manger un peu.

En arrivant à Mortagne vers 21 h je ne me sens pas trop mal et je monte bien la côte. Plein d'eau, photo, ravitaillement personnel, et je repars, équipé pour une longue nuit blanche sur le vélo. Je finis par trouver un groupe que j'arrive à suivre, à savoir le troisième peloton du sas D, parti 15 min après moi. Ca fait du bien de profiter de l'aspiration. Dans un village quelques gouttes de pluie provoquent l'arrêt des pessimistes, et surtout un trou avec ce peloton... Malgré plusieurs tentatives, je ne pourrai pas recoller. Maintenant j'ai les jambes lourdes, mal sous le pied droit, sous le métatarse et je ressens même des douleurs au niveau du rein droit. Là je redoute le pire.

Dorénavant je vais rouler seul dans la nuit jusqu'à Villaines la Juhel, trouvant désespérément long ce que je n'avais pas vu passer il y a quatre ans. Interminable, je ressasse des idées noires. Rien ne va. Quel truc de fou. Je sais que je n'irai pas au bout. Il faut faire demi-tour . En allant au contrôle j'ai très mal sous le pied. Bon au moins un tampon. Je bois et remplis mon bidon. Je prends le temps de manger. Je me dis alors que j'ai 80 h pour faire le tour, qu'il y a l'assistance, ... Bon je vais tenter d'aller vers Fougères. Dès la sortie du village je suis doublé. En gros je vais trouver deux sortes de cyclistes par la suite, ceux que je double, très rares, et ceux que je n'arrive pas à suivre.

Je cherche la manière de réduire mon mal de pied. La solution la plus efficace s'avère de ne pas appuyer, mais uniquement tirer, tout en desserrant un peu la velcro. L'alerte côté rein ne se reproduira plus. Je monte bien la longue côte, en danseuse, relançant même sur la fin. Ensuite je vais tout de même faire le yoyo avec différents petits groupes. J'apprécie grandement l'arrivée à Fougères.

Quand je repars je suis doublé par un couple de Suisses. Je décide de prendre mon temps, d'autant plus que le jour va bien finir par se lever maintenant. J'essaie de trouver le rythme. Mais j'ai toujours le sentiment d'être sur le mauvais développement. Je me retrouve finalement dans un petit groupe, ce qui est bien agréable face au vent. Dans Dingé il y a une bosse courte et je l'avale d'un trait avec facilité. Surprise : ça y est je fonctionne enfin. Bonne nouvelle. Tinténiac m'accueille. Nouveau contrôle. Ravitaillement.

Maintenant me voilà en direction de Loudéac, via Quédillac. Le vent est très fort de face, sauf dans les côtes qui nous abritent. Je roule avec des Allemands au début, qui hélas s'arrêtent. Il va falloir souffrir jusqu'à Quédillac : c'est pas le pied, ou plutôt si, c'est bien le pied qui me fait mal.

A Quédillac on nous demande de nous arrêter car un camion manoeuvre. J'en profite pour photographier et manger un peu. Puis je repars seul vers Loudéac. Au début pas trop mal dans les bosses, mais la galère dans les longues lignes droites face au vent. Et dire que je ne vais pas l'avoir dans le dos au retour... Je me dis que j'aurais mieux fait de partir le lundi matin. Du délire, car je crois bien que ce sera pire pour eux... Je suis content d'arriver à Loudéac, une heure et demi après Jean-Paul qui en fait m'a dépassé à Mortagne. Je mange un poulet-riz qui devrait me revigorer et surtout je me repose bien.

Après Loudéac je gère les côtes difficiles. Je double des vélos carénés dans les bosses et ils me repassent dans les descentes. Avec les paysages ceci remet du baume au coeur. Dans la longue montée vers Merléac je suis de nouveau dans le dur, petit plateau. Je me dis même que je vais finir par marcher à côté du vélo. Le pire moment de ce périple, je crois.

Avant Saint-Nicolas du Pelem je me retrouve dans un groupe, qui me lâche sur le plat et auquel je recolle dès que ça remonte. J'avale la bosse avant le contrôle secret, découvert à la dernière minute, car secret ! Du coup je me ravitaille bien et je fais en sorte de repartir avec un groupe. Lequel me larguera juste après Plouvenez-Quintin. Je vais gérer la suite tant bien que mal. Je me dis que grâce à mon foulard devant la bouche de temps en temps, j'ai évité le hoquet qui m'avait tant fait souffrir jusqu'à Brest il y a 4 ans. Mais bon j'aurais dû mieux gérer les alertes préalables concernant mon pied, mises sous le compte de la chaleur. 

Arrivé à Carhaix je passe le contrôle. Je me ravitaille bien. Jean-Paul m'a repris encore une heure, c'est dire que j'ai traîné ma peine... Bon heureusement que je ne le savais pas à ce moment. Et là, vu la force du vent, le profil de l'étape et surtout mon pied, j'ai envisagé sérieusement de rentrer avec le vent de dos, par le chemin le plus court.

Mais non, je n'ai pas le droit de faire ça à mon club, d'autant plus que ma douleur ne met pas en péril ma santé futur : ce n'est pas une articulation importante, ni une tendinite. Il faut encore serrer les dents, bien penser à ne pas appuyer du pied droit, même si une douleur commence à poindre sur le dessus de la cuisse droite. Cool. Et peut-être que la météo s'est trompée... Bref on y va voir le port de Brest. Allez un dernier effort.

Du coup je prends la bonne direction, ayant rapidement la chance de me retrouver dans un petit groupe, que j'ai remis sur la bonne route à une intersection, car ils prenaient la route du retour... Là j'ai réussi à suivre et à retrouver de la vélocité, de la facilité, en fait à l'abri du vent. Je suis resté avec ce groupe jusqu'au retour vers la route principale. Puis je suis parti seul vers Sizun dans la descente. Que ça fait du bien. Plus loin mon GPS m'a annoncé la panne de batterie, puis s'est arrêté. Bon je n'aurai pas le parcours total, d'autant plus que j'avais aussi oublié de le redémarrer à Mortagne.

Plus loin je me suis retrouvé avec un gars avec lequel j'ai discuté, puis d'autres cyclistes que j'ai dû laisser partir en mettant en marche ma lampe dynamo. Le peu d'écart de puissance a suffi... De nouveau seul j'ai profité de la tombée de la nuit. Dans la longue descente vers le pont j'ai vu le soleil qui se couchait à travers les haubans. Pas le courage de m'arrêter ici et remonter faire la photo... Par contre je me suis arrêté sur le pont pour immortaliser ce moment de plaisir. Puis je suis remonté tranquillement pour rejoindre le contrôle vers 22 h. Plus question de faire demi-tour. Mon compteur de vélo indique 619 km à 23,67 km/h pour une durée sur le vélo de 26 h et 7 min. Soit environ 3 h 30 d'arrêt.

Je vais me doucher, dîner et dormir ici à Brest. Le lendemain sera sans doute un autre jour. Je décide un réveil à 4 h du matin, réglé sur mon cycle du sommeil. J'apprécie grandement la douche. Je profite bien du dîner, avec crudités, oeufs, poulet-pâtes et yaourt. Je ne sais pas à quelle heure exacte j'ai dormi, mais j'ai bien dormi. Sur cette étape Jean-Paul ne m'a pas repris de temps.

J'entends du bruit et je me réveille : le second occupant de ma chambre arrive. Je demande l'heure. Il est 4 heures l'heure prévue pour mon réveil. Je quitte la chambre et passe par les toilettes. J'en profite pour remettre le cuissard de la veille avec une pommade. Je ne suis pas blessé cette année. Je rejoins mon vélo, l'ayant repéré par la protection de selle orangée, car il me semble qu'il a été déplacé, à moins qu'ils n'aient rajouté des barrières. Je mange un peu et me fais un café-chicorée froid. J'ai mis le collant et je suis bien couvert.

Il est précisément 4 h 33 quand je m'élance vers Paris. Je trouve qu'il fait plutôt chaud dans Brest. Dans un rond-point je me retrouve face à une croix : fausse route ! Je fais le tour et me retrouve un peu derrière quelques cyclistes qui roulent plus vite que moi. Je ne fais pas d'effort particulier pour les rejoindre. Je préfère rouler à mon rythme. Je n'ai mal nulle part, si ce n'est au niveau du métatarse droit, malgré mes chaussettes plus fines, quand j'appuie fort du pied droit. J'hésite à ôter mon collant, voire une couche, car j'ai vraiment chaud... Puis je rejoins les quelques cyclistes devant moi. Beaucoup de cyclistes sont arrêtés à Sizun, sûrement pour manger.

Je fais une petite pause technique et alimentaire un peu plus haut. Un cycliste passe à vite allure. Je me dis qu'il a la pêche. Je repars peu après lui. Lentement mais sûrement je le rattrape. J'ai de grandes sensations dans les jambes et j'accélère, le passant assez vite, en danseuse. Je continue ainsi jusqu'en haut de la bosse et son antenne visible de loin. Il n'y a pas de givre cette année. Mais des cohortes de lumières en sens inverse sur cette partie commune. Bientôt la route retour se sépare de la route aller. Je croise cependant des cyclistes qui ont oublié de tourner à droite après Carhaix ! Je pense qu'il faudrait renforcer le fléchage à l'intersection.

Quelques cyclistes me rejoignent. Je roule avec eux jusqu'au pied de Carhaix et les dépose sans le vouloir dans la montée jusqu'au contrôle. Il semble avoir plu, car l'herbe est mouillée. Je pose mon vélo contre une grille. Je vais chercher mon coup de tampon, puis reviens vers le vélo. Je mange une boite de sardines, délicieuses, et d'autres bricoles, tout en buvant un double café-chicorée froid. J'informe Gérard et Agnès. Il est environ 9 h quand je m'élance vers Loudéac. L'étape inverse qui fut galère pour moi s'avérera un pur moment de bonheur sous le soleil. Une courte halte au contrôle secret de Saint-Nicolas, comme la veille, puis je repars.

Je ne sens plus passer les bosses. Dans une bosse je pense même que mon cardio ne fonctionne plus, car le rythme est à 120 alors que j'appuie sur les pédales. En haut j'en profite pour resserrer mon support Bryton, boire, grignoter et ôter une épaisseur. Pendant quelques km des autochtones vont discuter avec moi et un autre gars du PBP. Puis ils rentrent chez eux, après une descente avec un virage dangereux, pris à la limite malgré leur avertissement ! Loudéac me surprend. Je pose mon vélo en bas du parking et vais faire le contrôle. Puis je remplis les bidons, mange ma seconde (je n'en avais que deux) boite de sardines et repars en direction de Tinténiac. Comment va être le vent ?

Favorable ! Très favorable. Je roule fort. Un groupe précédé d'un tandem me dépasse. Je prends les roues pendant un kilomètre environ, mais le groupe me distance dans une descente, puis une partie plane. Dans la bosse suivante je recolle, puis pars devant, dépassant d'autres cyclistes aussi. Le tandem va me rejoindre juste avant une nouvelle bosse. Là je décide de rester dans les roues, même si ça monte au ralenti. Des vacances pour moi... Dans un village il y a une cassure et je fais le sprint pour rejoindre la tête.

Mais quand je vois le risque pris par le tandem dans un virage à gauche en doublant un cycliste, je préfère me relever, car avec le vent favorable je roule facilement à 30 km/h. Un croate va me rejoindre. Je prends sa roue d'abord, puis remonte à sa hauteur. Nous allons discuter pendant quelques minutes de Croatie et d'incendies. Puis je lui fais signe de continuer car le vent me semble de face maintenant et je n'ai pas envie de lui sucer la roue. Je rejoins Quédillac et fais une pause crêpe à la confiture. Bien agréable. Je photographie plus loin l'église.

Le vent souffle de face. Je m'aperçois que j'ai laissé le GPS en pause. Ce sera la seule erreur sur le retour. C'est dur pendant quelques kilomètres, mais je double des cyclistes, sous les encouragements réguliers de spectateurs. C'est une chose remarquable tout au long du parcours : on se croirait sur le Tour de France dans de nombreux villages, y compris dans la nuit parfois. Ceci facilite les relances et aide à surmonter les difficultés.

Un fixie (plateau et pignon uniques) me double et je prends sa roue. Une côte arrive. Et il continue au même rythme, me lâchant avec facilité, alors que je monte bien... Plus loin le vent redevient favorable et je roule fort vers Tinténiac. Dans le bas du village un véhicule utilitaire (avec un grand A) me force le passage à un stop et me fera mettre pied à terre plusieurs fois dans la montée vers le contrôle. Le taux d'adrénaline monte et je peste. Je passe le contrôle. Un gars me photographie. Je mets mon foulard devant la bouche et lui demande de me photographier ainsi. Je lui demande s'il sait pourquoi je mets ce foulard.

Je lui explique que c'est pour éviter le hoquet, et ça marche et marchera bien jusqu'à l'arrivée. Je remonte la bosse à la sortie de Tinténiac seul. En traversant une route j'entends des voix : ce sont des Espagnols, en fait des Basques. Je vais alors prendre les roues du groupe. Il y a le gars de Mainsat, Laurent, avec lequel j'ai discuté à Brest lors de la queue pour le plateau-repas. Un des Espagnols roule trop au bord de la route, car il cherche à éviter le vent de côté, pas très fort. Il va passer plusieurs fois sur l'herbe. Je redoute la chute. Dans une bosse un Espagnol se projette à l'avant. D'un coup de pédale je dépasse le groupe et le rejoins pour discuter des cols du pays Basque, en attendant que les autres recollent. Dans une autre bosse je fais une accélération violente et me retrouve vite au sommet. J'en profite pour boire et grignoter une énième petite pâte de fruit. J'en ai prévu environ une tous les 25 km...

Je vais rester tranquillement dans les roues jusqu'à une dizaine de km de Fougères. Là le vent souffle de face. Je prends un relais, puis m'aperçois que personne ne suit. Je me relève. Puis dans une bosse je file et n'attends plus. Ce qui me permettra de tamponner sans faire la queue, car le groupe était devenu conséquent avec tous les cyclistes rejoints. J'informe Gérard et Agnès, je consulte le site de Mozac Cyclo Club et découvre que Jean-Paul n'est qu'à environ 4 h devant moi. Je me ravitaille tout en me rappelant qu'il y a 4 ans j'avais réalisé une superbe étape jusqu'à Villaines (94ème temps).

Je regarde l'heure et me dis que battre mon temps reste possible, à condition de faire une nuit blanche sur le vélo.  J'ai suffisamment de café et quelques comprimés de magnésium-vitamine C. J'en prends un et environ 50 cl de café-chicorée froid. Je monte bien la bosse sans forcer. Une cycliste à assistance électrique me dépasse et discute un peu. Je lui dis de ne pas se mettre devant moi, car je risque la disqualification. Je roule maintenant à plus de 30 km/h et 3 cyclistes du même club me rejoignent. Dans leurs roues ça fonce parfois à 40 km/h. Un bruit fort surgit soudain du quasi silence. Je crois d'abord que c'est mon moyeu dynamo. Puis je finis par comprendre que c'est la roue libre... Dorénavant et jusqu'à l'arrivée je devrai pédaler légèrement afin d'éviter le bruit. Je ne suis pas encore en roue fixe cependant.

Les 3 cyclistes s'arrêtent à un stand boisson/crêpe improvisé sur le bord de la route. Je continue et avale pas mal de cyclistes dans les bosses. Plus loin en haut d'une côte je rejoins un gars, qui ne fait pas Paris-Brest-Paris, mais Villaines-Brest-Villaines. Comme je ne peux pas rouler avec lui, je préfère lui dire de partir. Je vais faire une pause "lumière", à savoir mettre la frontale, me couvrir un peu et allumer la lampe arrière, à piles. Puis je repars dans la nuit tombante. Ma vitesse reste appréciable. En montant sur les grands pignons mon grand plateau ne tient pas. Le passage non volontaire sur le petit plateau surprend toujours. Je vais devoir gérer ce point aussi, alors que c'est de plus en plus fréquent.

Je passe dans un village en montant une côte à bloc, sous un tonnerre d'applaudissements et encouragements. Encore merci. Quand je suis en danseuse je ne peux que dire merci. Assis je fais un geste pour dire merci. Dans une montée un peu longue j'entends des voix devant moi et finis par rejoindre un groupe. Je discute un peu, puis je prends un long relais. Dans une descente je vois que plus personne ne suit. Dans Le Ribay la traversée de la route est un peu protégée. J'effectue une belle montée vers Hardanges, dans la nuit. Avant Villaines je ressens une sensation de froid, alors j'accélère. Je mettrai les collants là-bas pour le reste de la nuit. Le contrôle est vite effectué. Je mange et bois. Je galère pour enfiler mes collants. Je manque de tomber en déséquilibre sur un pied. Ouf ! je peux enfin partir vers Mortagne.

 

Je surveille l'heure. Il me reste environ 10 heures pour 210 km dont deux contrôles. Sur le plat je roule à 30 km/h environ. Le vent est faible, mais favorable. Je roule avec un Allemand parti dans le sas A avec la femme ayant remporté la Transcontinentale de Bulgarie à Brest, puis ayant rejoint Paris en 4 étapes, avant de repartir sur PBP. Il semble fort sur le plat, mais un peu moins dans les montées, puis de moins en moins bien. Nous discutons un peu en anglais. Plus loin dans un village nous retrouvons quelques cyclistes.

Puis dans la bosse vers Mamers je distance tout le monde, grimpant à mon rythme sans forcer. Un panonceau indique d'aller vers la droite. Je tourne. Je ne vois pas de croix, juste les deux yeux brillants d'un chat couché sur la gauche de la route. Il ne bronche pas, moi non plus d'ailleurs ! Plus loin j'hésite. Je m'arrête. Silence. Je décide de continuer. La route descend. J'arrive à une intersection. Pas de flèches. Un hérisson traverse la route juste devant ma roue, alors que je sui à l'arrêt. Demi-tour. Le vent était bien favorable... Il me faut remonter. 4,2 km de trop. Mon record n'est pas en péril, mais je grignote l'avance.

Plus loin je rejoins effectivement la route vers Mamers, qui monte bien parfois. Je stoppe au ravitaillement, bois une menthe fraîche et mange des rondelles de bananes et un morceau de gâteau. Puis je relance vers Mortagne. La dernière bosse est longue et il y a un mur, court, à 10% juste avant le contrôle ! Petit passage aux toilettes, rapide car j'ai un cuissard sans bretelles... Et je file vers Dreux, avec un bruit d'enfer dans la descente quand je ne pédale pas, surtout dans les virages... Je relance et appuie fort dans chaque côte, et elles se succèdent. Je double régulièrement des cyclistes. Je me souviens bien du parcours. Parfois le vent semble défavorable. Un cycliste couché me dépasse. J'essaie de prendre sa roue, mais il roule trop fort pour moi. Avant Dreux je suis à 30 km/h dans les zones planes. Dans Dreux je pense avoir loupé le contrôle. Les motos de la sécurité passant je leur demande où est le contrôle : plus loin. Je repars.

Il y a un peu de marche à pied entre le parking et le contrôle. Je prépare le carnet, mais aussi la batterie à brancher sur le GPS pour éviter la panne comme avant Brest. Je repars vite après avoir bien accroché la batterie au guidon avec une bande velcro. Dans Dreux il faut relancer. Le vent me semble défavorable et il faut appuyer fort pour flirter avec le 30 km/h. Dans une intersection je prends la mauvaise direction, mais m'en aperçois immédiatement. Demi-tour. Des personnes discutaient devant la flèche...

Ce ne seront que relances en danseuse jusqu'à l'arrivée. Dans la forêt je croise des groupes de cyclotouristes qui m'encouragent et me disent que c'est la dernière. Sympa. Que c'est long. Je consulte l'heure, calcule la moyenne pour arriver à 10 h, afin d'assurer le record avec une petite marge. D'un seul coup je vois apparaître un panneau Rambouillet 6 km. Je dois rouler à 18 km/h en moyenne. Je suis souvent à 30 km/h et à 20 quand ça remonte. Zut il faut faire le tour du parc par rapport au départ. Enfin l'entrée principale. Je suis presque au sprint. Une bosse dans le parc bien avalée. Un long faux-plat. Je vois la ligne. C'est bon ! Non, il faut descendre dans la cour. Je relance fort sur les pavés. Enfin la ligne. J'ai gardé la tenue de nuit depuis Dreux. Que j'ai chaud !!! 

Agnès n'est pas là pour la photo. Je pensais qu'ils anticiperaient mon heure d'arrivée à partir de mon passage à Dreux. Bon tant pis. Je rejoins le parking à vélo. Le bénévole conseille de ne pas laisser le GPS sur le vélo. Je l'enlève du support et le pose sur la selle (en fait le couvre-selle en mousse). Je me mets en tenue plus adaptée à la température. Puis je rejoins le contrôle final. Je prends une photo de tous les tampons. On me remet la médaille. Cette année je n'ai pas eu le temps de pleurer avant l'arrivée. Mais l'émotion est tout de même là, même si intériorisée. Et dire que j'avais été prêt à abandonner au bout de 200 km, même à abandonner le vélo ! Quel retournement de situation.

Je prends mon plateau repas. Je pensais avoir un véritable passage à vide durant ma chevauchée depuis Fougères. Rien de tel. Pendant le repas François m'appelle. C'est lui qui m'apprend que Jean-Paul n'est pas encore arrivé à Dreux... De 9 heures de retard à Carhaix, j'aurai près de 3h 30 d'avance à Rambouillet. Je vais avoir le privilège de le photographier à l'arrivée. En revenant vers mon vélo je découvre le GPS sur ma selle. Quel c.. Quelle chance ! Pas de blessure. Pas de courbatures dans les heures qui ont suivi.

622 km au compteur pour le retour et 23,37 km/h pour 26 h 36 sur le vélo.

65 h 23 min pour le parcours global, arrêts compris. J'ai amélioré mon temps de 10 min.

Si j'avais une fable à écrire, je l'intitulerai peut-être : de la torture au lièvre sur les routes de Paris-Brest-Paris.

 

Il me reste à insérer des photos et à corriger mon texte à tête reposée.

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